Grottes préhistoriques près de Le Change : un trésor archéologique du Périgord

18 septembre 2025

Un territoire marqué par la Préhistoire

La vallée de la Dordogne figure depuis plus d’un siècle parmi les hauts lieux de la préhistoire mondiale. Autour de Le Change, plusieurs grottes recèlent des vestiges qui continuent de passionner chercheurs et visiteurs. Mais en quoi ces cavités représentent-elles un patrimoine archéologique à part ? Pour le comprendre, plongeons dans mille siècles d’histoire humaine entre Les Eyzies et le Cingle de Trémolat, en passant par les proches environs de notre village.

L’inestimable richesse des grottes du Périgord

Départements, chercheurs, et habitants connaissent l’importance des grottes de Dordogne. Là, Homo sapiens et Néandertaliens ont laissé des traces de leur passage dès 40 000 ans avant notre ère. Mais il y a une spécificité locale : la concentration de sites majeurs dans un rayon de 30 km autour de Le Change.

Voici quelques noms emblématiques qui façonnent la renommée du secteur :

  • Grotte de Lascaux (Montignac) : mondialement connue pour ses fresques magdaléniennes, découverte en 1940.
  • Grotte de Rouffignac : surnommée "la grotte aux cent mammouths" pour la profusion de gravures.
  • Grotte de Tourtoirac : cette cavité combine beauté géologique et découvertes archéologiques.
  • Grotte de Villars : célèbre pour ses peintures et concrétions uniques en Europe.
  • Abri de Laugerie-Basse : un site classé au patrimoine mondial de l’UNESCO, véritable laboratoire de la Préhistoire.

Dans le proche secteur de Le Change, si l’on ne trouve pas une « Lascaux bis », on rencontre de nombreuses petites cavités peu médiatisées, mais intrigantes pour les spécialistes : la grotte du Roc de Saint-Cirq, les abris de La Boissière, ou encore certains sites secondaires autour de Bassillac.

Des chiffres qui parlent

  • Le Périgord concentre environ 400 sites préhistoriques répertoriés, dont plus de 25 grottes décorées, principalement dans un couloir de 50 km autour des Eyzies (Source : Ministère de la Culture).
  • Les fouilles locales, conduites depuis la deuxième moitié du XIXe siècle, ont livré plus de 100 000 objets, outils et restes fossiles (INRAP, Inventaire général du patrimoine culturel).

Des peintures rupestres à la vie quotidienne des premiers hommes

Si la région impressionne par sa densité de grottes ornées, l’essentiel de l’intérêt archéologique réside aussi dans la diversité des trouvailles. En voici un aperçu :

  • Des œuvres pariétales : Les grottes telles que Lascaux (à 40 minutes de Le Change) n’ont pas seulement été le théâtre d’œuvres d’art magistrales ; elles témoignent d’une organisation sociale et spirituelle inédite. Les chercheurs notent par exemple l’utilisation de pigments élaborés et la superposition de figures, indice d’une transmission culturelle au fil des siècles.
  • Des outils du quotidien : Racloirs, burins, harpons en os, aiguilles, perles, objets de parure… Le contenu des dépôts sédimentaires des abris sous roche de la région a permis de retracer l’évolution des techniques de taille et du mode de vie paléolithique.
  • Des sépultures rares : À La Chapelle-aux-Saints, un peu plus loin, la découverte en 1908 d’une sépulture néandertalienne a ouvert la voie à de nouvelles lectures de la relation à la mort chez nos ancêtres. Ce type de découverte reste précieux, les conditions de conservation étant exceptionnelles.

Anecdote locale

Les paysans du XIXe siècle, en creusant pour de nouvelles plantations près de Bassillac, sont tombés sur des silex taillés remarquablement réguliers. Au lieu d’y voir l’œuvre d’anciens habitants, certains pensaient qu’il s’agissait de « pierres de foudre » déposées par le tonnerre ! Il a fallu l’intervention de chercheurs parisiens pour comprendre leur réelle provenance.

Un éclairage sur l’évolution humaine

L’une des plus grandes contributions de ces grottes concerne notre compréhension de l’évolution humaine. Plusieurs points clés se dégagent :

  • Coexistence Néandertal/Sapiens : La Dordogne, avec des abris comme ceux du Moustier et de La Ferrassie, a offert les premiers indices tangibles d’une alternance ou d’une cohabitation entre Homo sapiens et Néandertaliens (Jacques Boucher de Perthes, rapport de 1860).
  • Apparition de l’art : Les fresques exhumées font remonter les premières traces d’expressions symboliques à environ 19 000 ans avant notre ère ici, bien avant d’autres régions européennes.
  • Ingéniosité technique : Les fouilles ont permis de retrouver des outils en silex issus de plusieurs cultures, comme l’Aurignacien, le Gravettien et le Magdalénien : chaque période ayant ses propres innovations.

Le Change : un maillon discret mais essentiel

Pourquoi Le Change mérite-t-il une attention particulière au sein de cette mosaïque archéologique ? Le secteur, situé sur les premiers contreforts du Périgord noir, offre un « carrefour » géographique stratégique :

  • Le passage de l’Isle et la proximité de l’Auvézère fournissaient eau et ressources aux premiers habitants.
  • La roche calcaire, creusée de multiples cavités, servait à la fois de refuge, d’atelier et d’abri temporaire.

Parmi les sites moins connus autour de Le Change, on note la présence de petites cavités ornées de gravures schématiques, probablement mal reconnues faute de fouilles récentes, mais qui attestent de la permanence de l’occupation humaine dès le Magdalénien. Des outils en silex et os retrouvés dans les alentours sont aujourd’hui visibles au Musée d’Art et d’Archéologie du Périgord à Périgueux.

À noter que l’arrière-pays de Le Change n’a jamais livré de « grotte vedette » comparable à Font-de-Gaume ou Combarelles, mais la densité de petits gisements prouve un tissu archéologique fin, emblématique de la vie préhistorique quotidienne.

Réhabilitation et valorisation aujourd’hui

  • Plusieurs campagnes de prospection sont actuellement menées en partenariat avec l’INRAP et l’université de Bordeaux, notamment sur les sites menacés par l’érosion de la falaise (INRAP, 2023).
  • Des circuits de randonnées, comme le « Chemin des Hommes » entre Bassillac et La Boissière, permettent de découvrir ces lieux en respectant leur fragilité.

Le rôle des grottes dans la transmission du patrimoine

L’aspect scientifique n’est qu’une facette de l’importance de ces sites. Les grottes et abris de la région jouent aussi un rôle éducatif et culturel capital pour les générations d’aujourd’hui :

  • Visites pédagogiques : Les écoles du secteur organisent de nombreuses sorties sur Lascaux II, Tourtoirac ou Villars.
  • Valorisation locale : L’association des amis du patrimoine du Pays de Le Change œuvre pour la signalisation des sites peu connus, tout en sensibilisant les habitants à leur préservation.
  • Liens avec les traditions orales : Nombre de familles du village évoquent encore l’époque où l’on descendait chercher de l’eau ou du salpêtre dans les grottes, ou encore les légendes de « fées » et « lutins » peuplant les cavités.

Anecdote insolite

Certains évoquent encore la fameuse « grotte aux chauves-souris » derrière le vieux moulin : en 1925, des enfants du village y découvrirent de très vieux os d’animaux. Un fragment de crâne a été confié à un chercheur venu en vélo depuis Limoges – ce fut le point de départ d’une première reconnaissance archéologique des lieux !

Un avenir entre science et respect du patrimoine

La richesse archéologique des grottes autour de Le Change rappelle à quel point chaque vallée du Périgord peut receler des informations majeures sur nos origines. Pour les chercheurs, chaque caillou, chaque fragment conservé raconte un morceau de notre lointain passé : modes de vie nomades, premières œuvres d’art, rites funéraires... Autant d’indices qui, mis bout à bout, tissent le récit de l’aventure humaine.

Pour les habitants et les visiteurs, la découverte ou la redécouverte de ces sites incite à la curiosité, au respect des lieux et à une transmission vivante du patrimoine local. Investir les sentiers, ouvrir les yeux lors des balades près de Le Change, c’est aussi rendre hommage à ces milliers d’années d’histoire silencieuse sous la roche.

Si la Dordogne doit en partie son surnom de « vallée de la Préhistoire » à ses plus illustres grottes, il ne faut jamais oublier la discrète mais effective richesse des petites cavités du secteur de Le Change, qui constituent autant de jalons essentiels dans l’exploration de nos racines.

  • Pour approfondir :
    • Musée national de Préhistoire, Les Eyzies
    • Ministère de la Culture, base de données « ArcheoSite » (www.culture.gouv.fr)
    • INRAP – « Grottes préhistoriques du Périgord » (www.inrap.fr)
    • F. Bordes, « Les grottes préhistoriques du Périgord », éditions Sud-Ouest

En savoir plus à ce sujet :